Quand j'ai fondé CAP!, je voulais soutenir des organisations qui portent des valeurs auxquelles je crois. 4 ans plus tard, et face au désir d'agir de tant d'actrices et d'acteurs, CAP! est plus que jamais utile.
Laura Châtel – Portrait de femme engagée
Laura est passionnée par l’écologie et impliquée depuis l’université. Spécialisée en Droit de l’environnement, bénévole dans une association, puis stagiaire dans un cabinet d’études sur la gestion des déchets, elle a été recrutée par Zero Waste France six mois après la fin de ses études. Elle coordonne aujourd’hui plusieurs campagnes de plaidoyer en France avec un objectif : zéro déchets, zéro gaspillage. Elle partage avec nous son parcours et son engagement.
Quel est l’objectif de votre plaidoyer ?
Nous en avons plusieurs ! De façon générale, l’objectif de Zero Waste France est de promouvoir le zéro déchets - zéro gaspillage. En réduisant les déchets, nous visons à réduire la consommation de ressources en France. Nous menons des plaidoyer tant pour promouvoir des règlementations plus strictes que pour faire pression sur des entreprises sur le territoire national. Mais nous sommes également très en lien avec des organisations au niveau européen et international. Nous faisons partie de Zero Waste Europe et de Gaïa, un réseau qui fédère les associations spécialisées dans cette thématique partout dans le monde. Nous nous investissons aussi dans le mouvement international #breakfreefromplastic. Nous sommes ponctuellement actifs sur des campagnes au-delà du niveau national : si un texte important sur la gestion des déchets passe au niveau européen et qu’il faut faire pression sur les États-Membres, nous sommes là.
Pourquoi faire du plaidoyer?
Chaque sujet politique fait l’objet d’un lobbying de la part des acteurs économiques qui défendent leurs intérêts. Il est indispensable que les associations puissent faire contrepoids et opposer une voix citoyenne pour faire valoir les intérêts sociaux et environnementaux face à ces intérêts économiques ! Si on laisse le champ libre aux lobbys, il n’y aura pas d’équilibre et on sait ce que ça donne : de mauvaises décisions politiques. Pour une association, s’intéresser au plaidoyer et influencer la législation permet de représenter les intérêts des citoyens, de les informer aussi, et ainsi de construire une expertise citoyenne indépendante sur un sujet donné. C’est primordial pour la démocratie.
Une Victoire?
Nous avons beaucoup travaillé sur une loi publiée très récemment : la loi de lutte contre le gaspillage et pour une économie circulaire. Depuis longtemps, nous visons les déchets produits par la restauration rapide. C’est un modèle de restauration très producteur de déchets car il est basé sur le tout-jetable. En 2017, nous avons mené une étude pour identifier l’impact environnemental de la production des déchets d’une chaîne comme McDonalds. En France, les restaurants McDonald’s produisent plus d’1 kg de déchets chaque seconde… Nous avons donc fait une proposition : pour la restauration sur place, interdire les produits jetables, les remplacer par de vrais couverts et assiettes. On a largement porté cette proposition auprès des politiques et dans les médias, jusqu’à ce que dans la loi, votée en février 2020, cette mesure d’obligation de vaisselle réutilisable soit présente ! Nous devons encore être patients pour voir la concrétisation de cette bataille car cette mesure ne sera applicable qu’en janvier 2023, mais c’est notre grande victoire cette année.
Qu’est-ce que le métier de Responsable Plaidoyer ?
Cela veut dire beaucoup de choses. C’est un travail large, aux tâches multiples. Dans de grandes organisations, certains responsables sont très spécialisés sur les propositions d’amendement et le travail règlementaire. Chez Zero Waste France, nous sommes une petite équipe donc je suis amenée à faire beaucoup de choses: formuler des propositions légales, faire émerger notre sujet dans le débat public, gérer les relations avec les médias, assurer le porte-parolat, mais parfois aussi mener des campagnes de mobilisation car nous sommes une organisation de terrain avec des points focaux partout en France, ce qui est un vrai atout pour peser sur décisions politiques. Toutes ces tâches sont menées en coopération avec d’autres collègues.
Quel est votre parcours?
Je ne me suis pas dit quand j’étais petite que j’allais devenir Responsable Plaidoyer ! J’ai fait des études de Droit, et je me suis spécialisée en Droit de l’environnement. J’ai ensuite fait un stage dans le domaine de la gestion des déchets au sein d’un cabinet d’étude. En parallèle de l’université et du stage, j’étais très impliquée dans une organisation de jeunes écologistes, à mi-chemin entre association et mouvement politique de jeunes. Cette expérience a été très importante car elle m’a permis d’acquérir des compétences d’argumentation et de compréhension des enjeux politiques. Six mois après la fin de mes études, j’ai candidaté au poste de Zero Waste France. Au départ, c’était un poste focalisé sur l’accompagnement et le conseil aux collectivités locales sur la gestion des déchets. Puis quand la personne en charge du plaidoyer est partie, j’ai repris ses responsabilités pour me concentrer sur le plaidoyer national.
Votre plus grande difficulté ?
J’ai la chance de travailler sur un sujet connu, qui est sur le devant de la scène politique en ce moment. La gestion des déchets a longtemps été un sujet ingrat qui n’intéressait pas beaucoup de monde, mais aujourd’hui on est plus facilement écouté. La difficulté est plutôt d’ordre personnel et quasiment psychologique: quand on fait du plaidoyer, on se heurte à beaucoup de freins, d’obstacles, à l’inertie du système, au poids des lobbys économiques sur la sphère politique. Or quand on s‘engage, c’est qu’on est très convaincus : c’est donc d’autant plus difficile d’accepter au quotidien que cela n’avance pas assez vite. Cela peut être décourageant parfois. Il faut sans cesse trouver de nouveaux éléments de motivation.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite s’engager dans le plaidoyer ?
Ce qui est important coté compétences, c’est de ne pas hésiter dans ses études ou en dehors à s’impliquer bénévolement pour apprendre à parler en public, à argumenter, à être à l’aise dans les relations sociales. Le plaidoyer se joue beaucoup là-dessus. Et puis, évidemment, il faut choisir une cause qui nous intéresse vraiment et à laquelle on croit parce que pour être bon, il nous faudra nous plonger dans la thématique, lire des textes parfois assez techniques sur le sujet. Cela demande d’être avant tout passionné par la cause que l’on défend !
Pour plus d'informations sur le travail de Laura au sein de Zero Waste France : https://www.zerowastefrance.org/lassociation/missions/