retour

Engager la société civile dans la REDD+

Trois ans après la restructuration du Groupe de Travail Climat REDD+ Rénové (GTCRR), plateforme nationale de la société civile en République Démocratique du Congo, le Programme des Nations Unies pour le Développement et la Rainforest Foundation Norway publient un rapport sur les leçons apprises et les bonnes pratiques pour la participation active et efficace de la société civile dans la REDD+. Il compile les principaux enseignements d’un processus complexe, parfois laborieux, mais in fine réussi, en espérant que ces enseignements puissent être utiles aux autres acteurs et pays engagés dans des processus REDD+.

Fondé en 2009, le GTCRR a pour vocation la représentation des communautés locales et peuples autochtones via ses membres dans le processus et les négociations nationales et internationales sur la REDD+. Cette plateforme a notamment contribué au développement du plan de préparation à la REDD+ (R-PP) et à l’insertion de questions clés relatives aux droits des communautés locales et peuples autochtones dans la stratégie nationale cadre REDD+.

« Le GTCRR a également contribué à influencer les négociations climatiques au niveau international, et sa participation a été très importante au niveau global pour le plaidoyer mené par les organisations de la société civile et des populations autochtones. Elle porte aussi un plaidoyer continu sur les réformes structurelles, dont la réforme foncière et celle de l’aménagement du territoire. Sans une société civile informée et engagée, ayant les moyens et capacités d’opérer un lien dynamique entre décideurs politiques et communautés locales, il serait très difficile d’élaborer et implémenter des politiques efficaces et équitables », souligne Josep Garí, Conseiller politique principal pour le développement durable au sein du PNUD.

Suite à une volonté de la société civile de mener une action plus efficace dans le processus REDD+, et de remédier aux dissensions internes, le PNUD et la RFN se sont engagés aux côtés de la société civile, des communautés locales et des peuples autochtones pour accompagner la restructuration du GTCR. Ce travail national et participatif a donné lieu en 2015 à la naissance du GTCR-Rénové, avec un fonctionnement national plus robuste et un ancrage fort en province, au plus près des communautés forestières pour garantir la totale implication de ces dernières dans la mise en œuvre de la REDD+.

Ce processus mené en République Démocratique du Congo a donné lieu à trois séries de leçons apprises. Elles s’appliquent de manière plus large dans les pays impliqués dans la REDD+.

En ce qui concerne le gouvernement, il est apparu qu’un tel processus de restructuration et de renforcement de la société civile représente une occasion unique de valoriser le processus REDD+ à l’échelle nationale d’une part, et de l’ancrer au niveau local d’autre part. Le gouvernement peut bénéficier de tous les avantages d’un tel engagement en l’intégrant dans le processus et en promouvant son engagement, permettant ainsi au processus REDD+ national d’acquérir à une plus grande légitimité.

Pour la société civile elle-même, le processus a confirmé que le socle de sa légitimité repose, d’une part, sur sa représentativité et, d’autre part, sur une professionnalisation du Réseau, ainsi que sur l’instauration d’un mode de gouvernance clair et transparent. Au cours du processus de restructuration, une attention particulière a été portée à la participation des femmes, des peuples autochtones et des jeunes. L’égalité de genre et l’engagement de la jeunesse ont notamment été les des piliers de l’approche participative mise en œuvre, et doivent continuer à inspirer le travail de la plateforme. Par sa capacité à favoriser la participation de toutes et tous, la société civile joue un rôle primordial pour faire le lien entre les différentes échelles du processus REDD+, du local au national, ainsi que pour informer ce processus grâce aux informations récoltées à la base. Le contexte de la République Démocratique du Congo, son manque d’infrastructure et les défis en termes de diffusion d’information rendent encore plus crucial ce rôle à jouer activement par la société civile.« Nous avons également pris le temps de définir une vision commune et un système de communication performant pour la plateforme, après deux ans de consultations en province avec les 230 membres signataires, et avec l’accompagnement d’experts nationaux et internationaux », témoigne Julien Kabalako, coordinateur national du GTCRR.

Pour les partenaires techniques et financiers, « l’enjeu consiste à assurer un soutien technique et un accompagnement rapproché à long terme, tout en garantissant l’indépendance, la stabilisation et la bonne gestion de la société civile », analyse Marine Gauthier, autrice du rapport et ayant coordonné le processus d’accompagnement de la restructuration en tant que consultante du PNUD. Le processus de restructuration a permis d’analyser les facteurs clés de la réussite d’un tel accompagnement, parmi lesquels :

  • La garantie de l’indépendance de la plateforme à travers la diversification, la pérennisation et la coordination des sources de financement, qui peuvent évidemment influencer la façon dont se comportent les Organisations de la Société Civile. Le plaidoyer national, international et local mené par la plateforme nécessite un appui technique sur le long terme, facteur primordial de stabilité. L’appui fourni en ce sens par le PNUD, membre de l’ONU-REDD, et par la RFN, par un suivi continu et la mise à disposition de ressources humaines spécifiques de la part des partenaires sont à saluer. Un véritable effort a été fait dans ce sens dès le début du processus de restructuration par RFN et le PNUD, qui ont assuré une communication et un co-accompagnement de la feuille de route. Ils ont permis de diversifier les appuis du GTCR-R et d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion au sein du Réseau, en lien avec les opportunités REDD+ actuelles. Afin de garantir l’indépendance de la Société civile, d’autres sources devraient être trouvées.
  • La définition de délais et des mécanismes de participation adaptés au contexte, à l’objet et à la diversité de la société civile peut garantir une véritable appropriation du processus et l’adéquation de la REDD+ aux objectifs de développement qu’elle s’est fixée. Il convient donc de se poser la question de l’échelle et de l’envergure de l’objet et de ses impacts afin de définir le type et le mode de consultation qui sera adapté. Le Consentement libre, informé et préalable, principe clé d’un programme REDD+ fondé sur le respect des droits, doit s’appliquer aux discussions tenues dans le cadre de REDD+ concernant les changements possibles de l’utilisation des ressources qui pourraient avoir une influence sur les moyens de subsistance des collectivités autochtones.  Les PTF ont un rôle à jouer en tant que garant des principes de participation et de représentativité en encourageant la société civile à parvenir à des résultats de meilleure qualité. Lors du processus de restructuration, c’est par la discussion et l’établissement de critères conjoints de sélection que le PNUD et la RFN ont favorisé cette représentativité. Suite au processus, le PNUD a travaillé en collaboration avec le GTCRR à la définition d’un guide de consultation pour la REDD+.

Le GTCRR œuvre aujourd’hui à mettre en place une large décentralisation via la grande responsabilisation des provinces. La plateforme, structurée et issue d’un processus de réflexion profonde, dispose de forces indéniables : une grande implantation en province y compris dans les territoires. Le réseau met en place des coordinations provinciales pour assurer le lien local-national et capitaliser sur l’expérience du terrain de ses membres.

De nombreux défis restent à relever, en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations issues du processus et particulièrement l’ouverture aux autres organisations de la société civile hors du secteur forestier, lui permettant de se spécialiser dans les piliers clés de la REDD+ et d’intégrer de nouvelles compétences.

« Le PNUD et RFN ont eu le privilège d’être les partenaires internationaux qui ont accompagné et soutenu les organisations de la société civile engagées dans la REDD+ et actuellement fédérées dans le GTCR-R » se félicite Øyvind Eggen, directeur de la Rainforest Foundation Norway, « et nous souhaitons poursuivre leur accompagnement dans ce sens afin de renforcer la bonne gouvernance de la REDD+ » ajoute-t-il.

Le rapport « La société civile rassemblée pour la REDD+ en République démocratique du Congo - Analyse et leçons apprises du processus d’engagement et de structuration de la société civile et des peuples autochtones dans le processus REDD+ national (2009-2015) » est disponible au téléchargement.

Vous pouvez également consulter le site de Rainforest Foundation Norway ici.